Le regain de confiance dans les syndicats se confirme

Publié le 19 février 2024


Selon le baromètre réalisé par OpinionWay pour le Centre d'étude de la vie politique de Sciences Po, 40 % des Français déclarent faire « très » ou « plutôt » confiance aux organisations de salariés. Du jamais-vu depuis le lancement du sondage, en 2009.

 

Les syndicats n'ont pas gagné la bataille de la réforme des retraites, mais les Français ne leur en tiennent pas rigueur. Leur image s'est même améliorée dans l'opinion publique, montre la dernière édition du baromètre de la confiance politique que vient de publier le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).

Selon cette enquête réalisée par OpinionWay entre le 8 et le 29 janvier 2024 auprès de quelque 3.500 Français de 18 ans et plus, 40 % d'entre eux déclarent faire « très » ou « plutôt » confiance aux organisations de salariés. Jamais depuis le lancement du baromètre, en 2009, ce seuil n'avait été atteint.

Au-dessus des responsables religieux

Les syndicats sont désormais bien au-dessus des responsables religieux (10 points), qu'ils ont dépassés en 2021. Ils sont au même niveau que les banques, qui avaient 7 points d'avance en 2020.

Certes, la France reste loin de l'Allemagne où le taux de confiance dans les syndicats s'est stabilisé à 56 % depuis 2021, selon la même enquête. Mais l'écart s'est singulièrement réduit : en février 2020, il s'élevait à 27 % dans notre pays et à 53 % outre-Rhin. Par ailleurs, l'Hexagone, qui faisait jeu égal avec l'Italie en 2021, fait désormais bien mieux qu'elle.

Epidémie de Covid, réforme des retraites et tensions salariales

Après un léger recul de la confiance dans les syndicats dans l'édition 2023 du baromètre, il y a donc eu un net rebond cette année en France. L'amélioration qui a démarré avec l'épidémie de Covid a été alimentée par la contestation de la réforme des retraites et sans doute aussi par le regain de tensions salariales lié à l'inflation.

Elle doit être mise en relation avec la crise démocratique que traverse la France. « La contestation de la réforme des retraites n'a fait que réactiver chez les citoyens une posture critique à l'égard de la démocratie représentative », soulignait Luc Rouban, chercheur au Cevipof, dans une note de mai 2023.

Bonne nouvelle

« Les gens n'attendent plus grand-chose des politiques » et cette désillusion s'accompagne d'un renforcement des attentes envers les syndicats, alors que « les grandes mobilisations hors syndicats type « gilets jaunes » n'ont pas obtenu grand-chose », explique-t-il aux « Echos ».

Ce regain d'intérêt est une bonne nouvelle pour les organisations de salariés et conforte un précédent sondage d'OpinionWay sur les jeunes adultes . Il confirme cependant que les syndicats sont confrontés à un enjeu majeur : transformer en adhésions cette sympathie qui se traduit par une forme de « délégation de la lutte sociale », selon les termes de Luc Rouban, alors que la confiance reste nettement supérieure envers les associations, à 65 %.

« Libéralisme d'autonomie »

Le politologue souligne par ailleurs que la progression de la confiance ne concerne pas que les syndicats. Elle touche aussi les grandes entreprises privées où elle est historiquement supérieure, avec un taux de 46 % en 2024 (contre 79 % pour les PME et 82 % pour les artisans). Ce mouvement s'inscrit dans le cadre d'un renforcement de la demande des citoyens à la fois pour un « libéralisme d'autonomie » et pour une protection de l'Etat et des services publics.

Ainsi, venant conforter la première attente, 57 % des sondés souhaitent que « l'Etat fasse confiance aux entreprises et leur donne plus de liberté », un chiffre significatif, même s'il est très inférieur à celui affiché par les Allemands, soit 66 %. La demande de protection se retrouve quant à elle dans le fait que seuls 42 % des Français estiment qu'il « faut réduire le nombre de fonctionnaires ».

Ce dernier item est en baisse quasiment continue depuis 2014. A l'époque, il atteignait 56 %. Luc Rouban y voit le signe que « ceux qui prônent un libéralisme à la papa sont à côté de la plaque, car les gens veulent des services publics ».

Source :www.lesechos.fr