Le président de la CFE-CGC: «On sait tous que cette concertation sur les retraites est un écran de fumée»

Publié le 30 septembre 2022


Opposé à un relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, François Hommeril participera à la «concertation» annoncée par le gouvernement, mais sans espoir que celui-ci «revienne à la raison»

Après avoir laissé planer le suspense pendant près de trois semaines sur un possible passage en force via un amendement dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), l’exécutif a annoncé ce jeudi que sa réforme des retraites ferait l’objet de son propre projet de loi «avant la fin de l’hiver», au terme d’une «concertation» avec les organisations patronales et syndicales. L’occasion selon la Première ministre, Elisabeth Borne, de mettre sur la table différents sujets chers aux syndicats, comme la pénibilité ou l’emploi des seniors.

Mais aussi de rappeler que le gouvernement n’envisage pas d’autre méthode qu’un report de l’âge légal de départ. Une option à laquelle le président de la CFE-CGC, François Hommeril, rappelle son opposition totale, au diapason d’autres organisations comme la CGT ou FO. Après trois semaines de tergiversations, le gouvernement annonce une concertation de quelques semaines sur sa réforme des retraites.

Qu’est-ce que ça vous inspire ? Je continue à penser que le plan se déroule sans anicroche ! Le gouvernement a agité, habilement je dois le reconnaître, la tactique du chiffon rouge en sortant l’hypothèse d’un amendement dans le PLFSS. Ils ont détourné l’attention sur la méthode au lieu du fond. Ils ont menacé d’un passage en force, et présentent maintenant comme une concession le fait de ne pas passer tout de suite en force, mais peut-être un peu plus tard. Avec, entre-temps, une concertation.

Justement, vous l’abordez comment, cette concertation ? Je vais la gérer comme j’avais dit qu’on le fera, c’est-à-dire sans aucun espoir que le gouvernement revienne à la raison. Car la raison serait de ne pas faire cette réforme qui serait le casse du siècle. Ce projet consiste à spolier les salariés d’une part non négligeable de la valeur qu’ils contribuent à créer sur leur travail, en la transférant sur d’autres projets. J’observe qu’on baisse les impôts de production de 8 milliards d’euros par an, et on dit aux salariés : «Il y a un déficit prévisible de 8 milliards sur les retraites, vous allez le combler en prenant sur vous la charge que ça représente.» C’est une fois de plus un transfert de la charge du travail sur le capital.

Si le gouvernement est décidé à reporter l’âge de départ et que les syndicats y sont unanimement opposés, de quoi pourrez-vous parler ? On sait tous que cette concertation est un écran de fumée, que le projet est déjà écrit, et que le gouvernement ne changera rien. Mais on fera valoir nos arguments devant l’opinion. Et il y a peut-être des sujets sur lesquels de vraies discussions pourraient s’enclencher : la reconnaissance des risques psychosociaux dans la pénibilité, l’emploi des seniors, les carrières longues… tout ce qui reviendrait à voir comment on peut réduire l’impact de cette réforme sur certaines populations.

Malheureusement, tout cela n’arrive qu’en deuxième position dans un projet qui va spolier les salariés et les retraités au moment où on parle de partage de la valeur.

Le gouvernement a d’ailleurs demandé aux partenaires sociaux d’ouvrir une négociation sur ce sujet.

source : Liberation, Franck DURUPT